jeudi 14 juillet 2016

Seïf Kadhafi peut-il libérer la Libye ?


Alors que l'OTAN, après la destruction de la Libye se prépare à en faire de même en Algérie, et que la Tunisie islamiste -Tunistan- participe à ces préparatifs en accordant à l'OTAN des bases militaires, une lueur d'espoir est née en Libye avec l'annonce de la libération de Seïf Kadhafi. Cette libération est l'un des développements les plus importants en Libye depuis un certain temps. Tous les grands médias occidentaux voudraient que les gens croient que le nom de Kadhafi est mort et enterré. Mais le fait est que Seïf et les membres survivants de la famille Kadhafi sont considérés comme des héros par beaucoup de Libyens. En outre, la libération de Seïf a le potentiel de transformer positivement la situation politique, économique et sécuritaire dans le pays, et plus généralement dans le Maghreb et en Égypte.
Bien que les détails soient rares, nous savons que, selon son avocat à la Cour pénale internationale (CPI), Seïf Kadhafi "a été déclaré libre le 12 Avril 2016" . En effet les documents officiels (qui restent non vérifiées) semblent soutenir l'affirmation que Seïf a, en fait, été libéré. Considérant les déclarations de ses avocats que Seïf est "bien en sécurité et en Libye," les ramifications politiques de ce développement ne devraient pas être sous-estimées. Non seulement Seïf Kadhafi est le deuxième plus âgé et le plus important des fils du colonel Kadhafi, il est aussi considéré comme l'héritier politique de son père pour le développement pacifique et indépendant de la Jamahiriya arabe libyenne.
28nytnow-libya01-facebookJumbo-v4Ce dernier point est d'une importance cruciale, car sa libération est un signal clair pour de nombreux Libyens que la résistance au chaos et à la guerre imposés par l’OTAN est bel et bien vivante.

Libye: Le Chaos règne grâce à l'OTAN

Afin de répondre à la question de savoir ce que signifie le retour de Seïf Kadhafi à la vie politique en Libye, il faut d'abord comprendre la nature de l'État libyen (si l'on peut même appeler ça comme ça) aujourd'hui. La Libye est devenue une nation fracturée composée d'au moins deux gouvernements :
- L’un, islamiste, émanation d’Al-Qaïda, à Tripoli, 
- l'autre modéré, non-islamiste basé à Tobrouk - avec la grande majorité des tribus ayant des liens avec le gouvernement Tobrouk et parfois, avec ses bailleurs de fonds en Égypte.

En effet, ce sont les tribus qui, à bien des égards, dominent la vie politique comme une grande partie de la société libyenne. Avec l’apport « de la démocratie et de la liberté » à coup de bombes françaises, américaines et autres, la Libye est revenue des siècles en arrière en revenant aux affiliations et aux loyautés tribales.

Avec la désunion créée par la guerre d’agression de l'OTAN, et l'introduction de l’atout de longue date de la CIA, le général Khalifa Haftar dans une équation politique déjà complexe, avec une myriade de factions et de loyautés changeantes, il devient difficile de savoir exactement où chaque groupe ou alliance se tient. Comme pour compliquer davantage la question, Seïf est détenu depuis 2011 par les milices de Zintan. Or les Zintanis n’étaient pas des amis de Kadhafi. Néanmoins, ils ont toujours refusé de coopérer avec les Frères musulmans (émanation d’Al-Qaïda) qui dominent Tripoli dans le cadre de la soi-disant coalition "Fajr Libya" ou « Aube Libyenne ».
Bien sûr, on ne peut pas oublier Abdelhakim Belhadj et les islamo-terroristes de son  Groupe Islamique Combattant Libyen (GICL) qui ont joué, avec l’aide des bombardements de l’OTAN, un rôle clé dans le renversement de Mouammar Kadhafi. Belhadj, ami intime de Ghannouchi, l'islamo-fasciste du Tunistan, est comme lui, le chouchou des services de  renseignement occidentaux et de leurs élites politiques  comme John McCain et Lindsey Graham (qui ont posé pour des photos avec cet infâme terroriste d’Al-Qaïda), est aussi accusé d'être impliqué dans la formation des terroristes d’ISIS en Libye. De même, le super chef terroriste Ghannouchi a été reçu dernièrement en France comme un chef d’État, et on comprend aujourd'hui pourquoi : pour  la mise en place de bases militaires de l'OTAN afin que les islamistes restent au pouvoir en Tunisie et en Libye, et qu'ils y accèdent en Algérie, après la destruction de l’État algérien (croient-ils). Ghannouchi n'a jamais pardonné aux Algériens d'avoir mis le FIS et autres GIA hors la loi. Pour lui, la revanche a sonné avec l'arrimage de la Tunisie au bloc anglo-sioniste, à l'image de la Jordanie, de la Saoudie ou du Qatar.
Tout cela pour dire que la carte politique de la Libye est comme un verre cassé en des dizaines de morceaux éparpillés par la destruction de la nation qui fut la plus prospère d’Afrique.
Un élément clé de la situation politique en Libye, qui est souvent ignoré, est le rôle du président de l'Égypte, Sissi. Son gouvernement a apparemment fourni un appui aérien au gouvernement de Tobrouk et à ses alliés tribaux luttant contre les terroristes d’ISIS / Daesh, et aussi contre les groupes affiliés Al-Qaïda. Des sources en Libye ont transmis que, contrairement à des rumeurs sur les médias sociaux, les forces égyptiennes ont étroitement collaboré avec certaines factions libyennes clés, y compris des représentants des tribus loyalistes aux kadhafi.

Le leader dont la Libye a besoin, le chef qu'elle mérite

C’est dans ce contexte politique vertigineux que l'on doit examiner l'importance d'un retour potentiel de Seïf al-Islam Kadhafi. Seïf reste un héros pour de nombreux Libyens qui voient en lui l'héritier de l'esprit d'indépendance de son père, un homme dont l'éducation, l'érudition, et l'expérience des temps de guerre, le plus important facteur, font de lui un leader naturel.
Il faut se rappeler que Seïf était le principal avocat du rapprochement entre la Libye et l'Occident au début des années 2000, le fer de lance de la campagne pour le démantèlement du programme nucléaire et de missiles balistiques libyens. Cependant, en 2011 et suite à l’agression illégale des États-Unis-OTAN contre la Libye, Seïf a changé son fusil d'épaule, regrettant terriblement d’avoir pris au mot les dirigeants occidentaux. Dans une interview désormais célèbre à RT menée au milieu de la guerre d’agression de l'OTAN, Seïf a déclaré:
    «De nombreux pays, dont l'Iran et la Corée du Nord, nous ont dit que c’était une grave erreur d'avoir cessé de développer des missiles à longue portée et de faire ami-ami avec l'Occident. Notre exemple montre qu'il ne faut jamais faire confiance à  l'Occident et rester  toujours en alerte. Pour un dirigeant occidental, il est normal de changer d'avis pendant la nuit et de commencer à bombarder la Libye dès l’aube suivante... L'une de nos plus grandes erreurs est que nous avons retardé l'achat de nouvelles armes, en particulier de Russie, et d’avoir retardé la construction d'une armée forte. Nous avons pensé que les Européens étaient nos amis; notre erreur était d'être tolérant avec nos ennemis ».
On sentait la pénitence dans la voix de Seïf, un homme qui a reconnu sa responsabilité dans l'affaiblissement de son pays, prélude à son invasion par des hordes étrangères. Mais la contrition de Seïf, presque un plaidoyer pour le pardon de son peuple, a également été vue par de nombreux Libyens comme la marque de son vrai caractère, un homme qui a franchement  endossé la responsabilité de la défaite, tout en restant rebelle contre la plus puissante alliance militaire dans le monde, et à ses harkis slamo-terroristes. Pour beaucoup, ce fut le moment - avec son apparition à l'Hôtel Rixos de Tripoli devant une foule de journalistes et de Libyens stupéfaits - où Seïf a cessé d'être simplement LE fils préféré, pour devenir LE nouveau leader de bonne foi.
Aujourd'hui, près de cinq ans plus tard, Seïf reste le fils choisi de la Jamahiriya Arabe Libyenne. Un homme qui a enduré cinq ans de détention aux mains de ses ennemis, qui est resté rebelle aux États-Unis et à leurs institutions fantoches telles que la Cour Pénale Internationale. Il est l'homme qui, pour beaucoup, représente la promesse d'un avenir meilleur en symbolisant un passé meilleur.
Et voilà pourquoi les factions islamistes à l'intérieur de la Libye et leurs bailleurs de fonds aux États-Unis et en Europe, sont terrifiés à l'idée que Seïf al-Islam Kadhafi revienne. Elles comprennent parfaitement ce qu'il représente. Elles savent que Seïf représente la loyauté et le respect de la majorité des Libyens, bien plus que toute autre personne ou faction. Ils savent que Seïf est soutenu par les tribus les plus influentes du pays, ainsi par  la Résistance Verte qui a émergé à des moments clés de ces dernières années, y compris la brève prise de contrôle d'une base aérienne critique dans la ville méridionale de Sabha en Janvier 2014. Ils savent que Seïf est le seul leader qui reste en Libye qui peut unir les formations politiques disparates en une seule force capable de vaincre enfin les éléments djihadistes soutenus par les États-Unis et l'OTAN.
Mais la crainte qu’inspire Seïf va encore plus profond que juste le leadership théorique qu'il représente. Les pouvoirs en place craignent la force politique qu'il représente déjà. Lorsque la condamnation à mort de Seïf a été rendue par un tribunal tout aussi bidon que scélérat à Tripoli, les partisans de Kadhafi et de la Jamahiriya sont descendus dans les rues de Benghazi, Syrte, Bani Walid, et d'autres villes à travers le pays, bien qu’ISIS et Al-Qaïda contrôlent une grande partie de ces villes. Au risque de leur propre vie, ces Libyens ont exhibé des portraits du colonel Kadhafi assassiné et celui de Seïf al-Islam, scandant leurs noms et appelant à une restauration du gouvernement socialiste. Considérez le dévouement et le courage nécessaires pour risquer sa vie dans une manifestation de soutien politique. Maintenant, imaginez ce qui se passerait avec Seïf libre.
Des sources en Libye, et parmi celles qui ont fui vers les pays voisins et vers l'Europe, ont noté que des éléments de l'ancien gouvernement Kadhafi ont travaillé en étroite collaboration avec le gouvernement Sissi en Égypte. Bien qu'il soit difficile de le confirmer de manière indépendante, une telle démarche est tout à fait plausible, compte tenu de l'ennemi islamo-terroriste commun. De plus, la Libye partage une longue frontière poreuse avec l'Égypte. En supposant que la collaboration soit vraie, cela représente une autre raison pour laquelle les États-Unis et leurs mandataires, pour ne rien dire des groupes terroristes à l'intérieur de la Libye, ont grandement à craindre la liberté de Seïf. Avec le soutien de l’Égypte, des conseils tribaux les plus importants, et des éléments des factions disparates sur le terrain, Seïf serait instantanément devenu le plus puissant homme en Libye.
Seïf est l'espoir du peuple libyen qui a souffert des horreurs innommables ces cinq dernières années. Même ceux qui n’ont pas un amour éperdu pour Kadhafi, comprennent l'importance de reconstituer une seule Libye, unie sous un seul gouvernement. Seulement Seïf al-Islam Kadhafi peut le faire maintenant. Voilà pourquoi la liberté pour Seïf pourrait un jour signifier la liberté pour la Libye.
Source : Eric Draitser
 analyste géopolitique indépendant basé à New York
http://journal-neo.org/2016/07/14/freedom-for-Seïf-al-islam-gaddafi-freedom-for-libya/
Hannibal GENSERIC